Le trajet avait été bizarrement silencieux. Il faut dire qu’aucun membre de la petite famille n’était spécialement bavard ; mais habituellement, Luther discutait de tout et de rien avec Kara, ou alors ils montraient des choses autour d’eux à Alice. Il y avait une ambiance un peu lourde, en fait… Sûrement causée par la dispute que les parents avaient eu une heure auparavant. Ils n’étaient toujours pas d’accord sur la façon de faire. Rester ou partir, se battre ou se cacher… Finalement, en voyant Alice affectée par leurs disputes, ils s’étaient arrêtés et avaient proposé une sortie. Mais où ça ? A l’Île aux pirates. Alice aimait cet parc d’attraction ; elle y avait rencontré les Jerry, ces androïdes qui avaient été si gentils avec elle, toujours. Et puis, c’était tout de même des bons souvenirs, là-bas… Surtout son tour sur le carrousel. Ca avait été magique. Comme si pour une fois, elle était vraiment comme les autres petites filles : au parc d’attraction avec sa famille. Alice avait besoin de sentir cela à nouveau, maintenant plus que jamais. La petite famille marchait donc à travers le parc, très vide ; les Jerry n’étaient pas là, après tout. Attirée par un stand pour gagner des peluches, Alice s’éloigna de ses parents, ramassant un nounours bien abimé par l’hiver qu’il avait traversé. Elle retira la poussière, avant d’entendre du bruit derrière elle. Kara et Luther n’étaient plus là, à la place se trouvait un inconnu.

En croisant son regard, la petite fille comprit tout de suite qu’elle était en danger. Mais elle ne pouvait pas appeler à l’aide ; sa voix ne marchait pas. Elle tenta de reculer, se coincant elle-même à l’intérieur du stand, tandis que l’homme - le jeune homme en fait, il semblait avoir à peine la majorité- s’approchait.

“T’es une de ses foutues machines, hein ? Une petite fille parfaite. Quelle blague. Mes parents aussi ont voulu un de ces gamins parfaits. Et d’un coup, j’existais plus… Parce que moi, il fallait m’en occuper plus que en me mettant au lit chaque soir. Moi, j’étais pas bien obéissant.”

Alice ne savait pas où fuir. Elle était bel et bien coincée, sans moyen d’appeler Kara et Luther, face à un humain qui détestait les androïdes.

“Elle te ressemble trait. pour. trait… Ah, c’est parfait les androïdes. Ca peut tout faire, même tuer des humains. Mais tu me tueras pas, moi.”

Il attrapa agressivement le bras de la petite, la tirant vers lui. Alice essaya de crier en vain, tandis que son agresseur attrapait sa gorge. Les larmes coulaient sur les joues de la petite terrifiée, persuadée qu’elle allait mourir ici.