You're still the one

Un calme incroyable régnait au sein de la DPD depuis ce matin. Trois jours après l'injection de cette encre colorée sur son bas ventre, Taylor continuait de montrer certains spasmes à cause de la douleur engendrée. Hank n'avait pas encore pu entrevoir le résultat final, mais il se sentait carrément emballé. Même s'il n'avait pas pu s'empêcher de la sermonner quant à la nature du projet. Aussi tôt après une opération lourde ? Elle avait eu l'accord de son médecin référent, le Dr. Reeves en personne, qui avait eu le culot incroyable de la convoquer à l'hôpital pour vérifier de ses yeux que tout était parfait ! L'australienne n'avait pas aimé montrer ce qui se cachait en dessous du nombril.

Mais que voulez-vous... Sa santé passait bien avant ses petits tracas dus à sa pudeur n'est-ce pas ? Alors elle continuait de faire le plus attention possible, prenant tout son temps pour un tas de choses, jusqu'à la plus insignifiante. Malgré sa remise sur pied, elle n'avait pas le droit de porter d'objets lourds. Elle était ainsi assistée dans l'open-space par nulle autre que sa charmante et préférée collègue, @Rhody Glover, sous le regard minutieux et implacable de @Connor RK800 qui n'avait pas fini de s'en vouloir pour la fusillade. Taylor lui avait pardonné dès son réveil pourtant ! Mais l'androïde cherchait pertinemment à se faire pardonner pour son soi-disant manque de vigilance sur le terrain. De quoi baisser les bras rapidement.

En cette fin d'après-midi, l'analyste reçut pour son plus grand plaisir un texto de Hank. Le pauvre se farcissait des entretiens à n'en plus finir avec le capitaine Fowler et une multitude de gars en costume trois pièces. Le sujet de la discussion ? Elle n'en savait rien, mais son bougon de lieutenant, lui, n'était pas prêt à la supporter ! Observant l'heure tardive et sentant son estomac la rappeler à l'ordre, la blonde lui envoya une courte réponse avant d'éteindre son écran. Son trench sous le coude, elle salua Rhody et Connor avant de prendre le bus en direction du lieu de rendez-vous. Le Henry Ford Commemorative Park était déjà bien vert à cette période de l'année, et il avait évité de justesse les sévices de l'Opposition qui continuait de faire rage dans Détroit.

Lorsque le bus la déposa aux abords du parc, Taylor n'eut pas beaucoup de marche à faire avant d'apercevoir au loin Hank, qui lui tournait le dos. Une belle façon de lui dire coucou non ? Elle avança vers lui sans faire de bruit puis, telle une gamine qui désire faire une surprise, elle déposa son trench sur l'herbe et plaça ses mains devant les yeux de son amoureux.

▸Devine qui c'est ?

Un léger rire quitta ses lèvres roses tandis qu'elle vint se poser devant lui pour l'embrasser. Elle aimerait tellement se coller à lui, mais sa cicatrice couplée au tatouage lui rendait la tâche impossible. Mettant fin au baiser un peu trop rapidement, elle s'interrogea immédiatement sur l'état d'esprit de Hank.

▸Bon ! Tu as survécu finalement.

Est-ce qu'elle avait douté de sa capacité à tenir devant tous ces hommes en costard ? Oh non, pas le moins du monde, mais elle l'imaginait très bien les envoyer balader au premier mot de trop. Le lieutenant Anderson était notamment connu pour ses phrases cinglantes et ses propos déplacés envers Fowler. Tout le monde le savait à la DPD ! Même en dehors de la police. Mais l'australienne voulait recueillir son ressenti.

You're still the one

Le pape en claquettes. Remercions l'humour totalement décalé du vieux lieutenant qui avait le don de faire rire l'australienne. Bon, peut-être pas au début de leur relation n'est-ce pas ? Du temps où Hank refusait ses services, prétextant que la Barbie Pétasse n'avait rien à faire en renfort à la police. C'était il y a six mois, comme quoi les mentalités pouvaient changer... Profitant d'un baiser assez court, l'analyste s'inquiétait de l'état d'esprit de son homme qui, apparemment, avait survécu à cette longue matinée de réunions à n'en plus finir. Si Hank se considérait comme un super héros, Taylor elle, préférait garder le silence et attendre qu'il daigne lui raconter un tant soit peu ce qu'il venait de subir. Et selon lui, il n'y avait rien à déclarer.

▸C'est pas si mal !

Des remontrances certes, mais un effort à souligner. la brigade avait perdu ses indemnisations de la ville suite au raid du onze novembre. Le peu de policiers encore disponible faisait de son mieux pour rétablir l'ordre mais... C'était difficile de travailler quand l'Opposition leur mettait des bâtons dans les roues tous les jours. Dans tous les cas, la demoiselle pouvait être fière de son mec ! Aucune frasque n'avait été dite. Le capitaine Fowler a dû halluciner ! Bref. Le couple s'observait. Hank caressait les cheveux de sa belle, l'interrogeant à son tour sur sa matinée à la DPD. La routine, mais pas seulement.

▸J'ai pris la liberté de rédiger tes comptes-rendus de mission. Je sais que tu détestes ça, et avec ces réunions, je me suis dis que je pouvais te rendre ce service.

Dont celui qui traitait de son accident dans le métro du retour de Jéricho. Connor n'avait pas eu la force de le remplir, lui qui ne se permettait aucun écart d'habitude. Alors la blonde s'en était chargée, comme si elle voulait éloigner le mauvais sort. Elle ne voulait plus jamais en entendre parler, si bien qu'elle ne laissa pas le temps à Hank de rétorquer quoi que ce soit à son initiative administrative.

▸Pourquoi m'as-tu appelée chéri ?

L'homme habillé de son costume trois pièces gris teinté d'une cravate jaune avait attendu la fin de la journée pour lui raconter tout ça. Elle s'attendait à un coup de fil de sa part avant, mais ça n'avait pas été le cas. Étrange tout de même... D'autant que cette proposition de promenade sous ce Soleil couchant ne faisait pas partie de ses habitudes.

You're still the one

La réaction d'Anderson ? La remercier chaleureusement d'avoir scrupuleusement rempli tous ses rapports de mission. Encore beaucoup de paperasse qu'il fallait vérifier et compléter, ce que la blonde avait fait avec le plus grand soin. Rhody s'était ainsi portée volontaire pour archiver tous les dossiers comme il se devait avant de voir la belle australienne quitter l'open-space pour rejoindre son cher et tendre ici, dans ce parc verdoyant et prospère. Mais elle tiquait Taylor, de se retrouver dans un lieu pareil à une heure pareille.

▸Oh mais je suis comblée ! Tu as eu une idée de génie.

Et merde, elle s'en voulait presque, d'avoir pointé du doigt cette inhabitude de sa part. Hank a pensé pour eux deux cette fois-ci, chose à laquelle elle répondit par un simple baiser sur ses lèvres. La moustache de son homme la chatouillait, mais elle n'en dit rien. Et maintenant que le besoin de se rassasier avait émergé, son estomac se joignit à la partie. C'est ainsi que le couple bougea de sa position et se balada quelques minutes, main dans la main, vers un petit stand de hot-dog qui attendait ses premiers clients du soir. Son lieutenant avait donc faim !

▸J'ai un petit creux pour ma part.

Soucieuse de son corps de Barbie Pétasse trop impeccable ou presque, la blonde se prit un bagel végétarien et une bouteille d'eau pétillante. Toujours aussi fidèle à ses habitudes hein ! Et lorsque le couple fut bel et bien servi, ils se posèrent l'un à côté de l'autre sur ce qui semblait être le plus beau spot de tout le parc. Face à un lac artificiel, le ciel teinté des dernières lueurs du jour, et cette immense boule jaune-orangée qui descendait peu à peu derrière l'eau claire.

▸Ce coucher de Soleil est somptueux...

Elle dégustait ici son bagel, le regard perdu vers l'horizon des évènements, comme si elle avait mis de côté son rôle de River au sein de la Rébellion. Car devant pareil spectacle, elle ne se souciait plus de ce qui l'entourait, ni du visage du lieutenant qui trahissait quelque chose...

You're still the one

Taylor se sentait envahie d'une douce chaleur tout à coup. Ce coucher de Soleil avait la faculté incroyable de lui procurer une sensation de bien-être absolu. À ses côtés, Hank usa du même mot qu'elle avait employé pour qualifier ce spectacle saisissant. Elle serait restée assise là jusqu'à ce que l'astre ne se couche, mais le lieutenant avait d'autres projets pour elle. Comme celui d'amener la blonde au plus près du lac rien que pour la beauté du lieu ? Entendant cette proposition, elle lui esquissa un franc sourire en guise de oui, tandis que le quinquagénaire lui prit les mains pour l'aider à se relever. Elle marchait sur l'herbe fraîche, gardant les yeux rivés sur la grosse boule jaune orangée qui se reflétait sur l'eau du lac. Ce n'est qu'une fois plus proche que l'homme cessa l'allure pour lui caresser sa longue chevelure. Un geste qu'elle appréciait tout particulièrement, mais qui fut brutalement interrompu par un changement de ton radical.

▸Chéri, qu'est-ce qui se passe ?

Génial... Comment dire que la magie venait tout simplement de disparaître de par cet avertissement sorti de nulle part ? Elle l'observait, le regard incrédule. Et la panique commençait à la gagner, comme si son vieux mec allait lui dire que tout était fini. Mais ça n'avait aucun sens ! Pourquoi se reculait-il de la sorte ? Qu'avait fait l'analyste pour mériter cette cruelle affirmation, ce cliché du Taylor ! Il faut qu'on parle ! aussi brutal ? Il s'écoula de longues secondes qui parurent des heures, où le couple se regardait droit dans les yeux. Jusqu'à ce que Hank ne vienne à poser un genou à terre et...

▸Oh mon Dieu.

Oh non, l'australienne ne rêvait pas. Le lieutenant Anderson ici présent sortait de sa poche un écrin velours, et lorsqu'il l'ouvrit, Taylor put découvrir une sublime bague en argent sertie d'un diamant bleu. Elle ne paniquait plus non... Mais elle n'était pas capable de dire quoi que ce soit, maintenant qu'elle venait de tout comprendre. Cet appel pour la rejoindre au parc, la vue du coucher de Soleil sur le lac... Il avait tout prévu ! Elle avait la gorge nouée, elle sentait son corps irradier, comme s'il n'y avait rien d'important sur la Terre hormis ce moment-là. Et lorsque l'homme se décida à prononcer les cinq petits mots qui avaient le pouvoir de changer des vies... Oui. Rien de plus.