Where is my mind ?

Six mois de captivité et un jour de plus au compteur. Comme le temps passe vite, surtout lorsque le poil de carotte se faisait trimballer dans le couloir par deux gros bras de plastique à une heure indécente ! Ce qu'il avait bien pu faire pour contrarier Sa Majesté ? Il n'en savait rien. Ça ne pouvait qu'avoir un lien avec Wolfy dans le fond, puisque le connard lui avait encore explosé le nez. À moins que ça ne soit autre chose ? Comme le fait que le taré ne donnait pas assez de résultats à North ? Ses voix disaient tout et son contraire, à tel point qu'il ne parvenait pas à les dissocier tout court. Et puis de toutes manières, il venait d'être placé en position allongée dans une lieu sombre qu'il ne connaissait pas, à côté d'une femme qu'il n'avait encore jamais vu et qui lui souriait comme si Owen était son cadeau de Noël.

▸Où est-c'que j'suis ? Vous êtes qui ?

Officiellement, elle s'appelait Embers aux yeux des déviants ici présents. Mais elle préférait sourire ouvertement à la question du rouquin, tandis qu'une paire de talons raisonnait sur le sol de cette pièce bien trop grande à son goût.

▸Embers ? Tout est prêt pour l'expérience ?

La voix de la salope en chef... Il aurait dû s'en douter. Personne d'autre qu'elle ou @Samaël HR400 n'avait le droit de venir le choper dans sa cellule en pleine nuit. Une drôle de sensation vraiment. Allait-il tester une nouvelle forme de torture en cette quasi mi-mai on ne peu plus détestable ? Il semblerait que oui, et l'américain s'en réjouissait. Le malade... Alors, lorsque North osa enfin se pencher au dessus de son corps attaché pour lui adresser quelques mots, il lui montra son plus beau cliché.

▸Je vais enfin savoir ce qui se cache dans ta tête Owen.

▸Moi aussi. Ça sera marrant !

Tout à coup, un fou-rire démentiel s'empara de lui. Comme s'il était possédé par un je-ne-sais-quoi délirant. Comme s'il avait inspiré une bonne dose d'hélium avant qu'on ne lui mettre un objet de torture sur le coin de sa belle gueule. La fatigue jouait sur son état d'esprit suffisamment perturbé c'est vrai... Mais il était très loin de se douter que la petite expérience mentale qu'Embers était sur le point de subir allait le plonger dans l'un des meilleurs trips qu'il lui était donné de voir.

Where is my mind ?

Il avait un casque sur sa caboche, relié à une grosse machine. Non mais où est-ce qu'elles se sont crues ces deux-là sérieux ? Dans Retour vers le Futur c'est ça ? Il n'en pouvait plus de rire, tellement obnubilé par la torture qui allait suivre. Lui qui s'était contenté du silence absolu depuis son changement de cellule, disons qu'il se sentait subitement plus utile pour la Rébellion. C'était franchement débile de le penser ! Mais il ne fallait pas oublier qui était Owen aux yeux de tous... Si ce n'est qu'un sale dealer de Red Ice au chômage et qui puait la folie à plein nez.

▸Il est prêt. Tu peux y aller Embers.

▸C'est ça ma jolie ! Renvoie-moi vers le futur !

Tandis que North se décala vers sa partisane, le rouquin se mit à siffler la musique de ce putain de générique de film. Comme s'il se prenait pour Marty McFly à bord de sa DeLorean, Owen mimait au mieux l'un de ses passages préférés lorsqu'il sentit une décharge se propager dans le fond de son crâne. Il cessa immédiatement, incapable d'entendre ce que Embers pouvait dire à la salope en chef. Ses voix s'étaient planquées, laissant le poil de carotte seul face à ce mal qui dura pas moins d'une minute et puis, il se mit à voir des brouillons. D'abord troubles, comme s'il avait besoin de lunettes de vue pour mieux les voir, les images se firent de plus en plus claires et soudain...

▸Putain d'merde. Pas elle...

Son corps se raidit tandis qu'il réalisait la douloureuse vision. Son esprit torturé avait fait un bond de vingt-et-un ans dans le passé. Il était donc âgé de cinq ans le rouquin, il vivait dans cet appartement hérité de sa mère depuis. Et il savait ce qui allait se passer. Le premier janvier, il farfouillait dans un placard en quête de bonbons. Il ne s'attendait pas à mettre la main sur la cache de Red Ice de sa mère. De jolis cristaux rouges qu'il avait pris soin d'observer sous tous les angles avant d'essayer d'en prendre. Pris sur le fait Owen ! Sa chère matrone n'avait guère accepté qu'il y touche, et la double gifle qui s'en était suivie ne faisait que confirmer le tout. Oh il s'en souvenait bien de cette maltraitance. Elle lui avait pété le nez... Tient ! Ce détail lui avait semblé plus douloureux à l'époque ! Peut-être parce que son compagnon de cellule tapait plus fort ?

▸Tient donc. Voilà qui est intéressant...

Face au spectacle que son prisonnier lui offrait sur un plateau d'argent, la cheftaine semblait entrevoir un début d'explication quant à la folie d'Owen. Il se faisait donc frapper par sa mère ! Mais où était donc passé son père...? Peut-être le verrait-elle dans un autre souvenir ? Dans tous les cas, North laissa le soin à Embers d'en tirer ses propres conclusions, avant que la belle corrompue ne change de chaîne.

Where is my mind ?

Quelle bande de salopes ! Toutes les deux ! Owen n'en revenait pas de devoir subir ses vieux souvenirs de la guerre... Oh oui ! Il les appelait comme ça et alors ? Il se faisait maltraiter sur tous les fronts. Si ce n'était pas sa mère, les mecs de son école s'en chargeaient pour elle. Toujours bloqué lorsqu'il avait cinq ans, il revoyait encore la colère de sa matrone, ses yeux exorbités et cette haleine pourrie par la Red... Un véritable florilège ! Mais ce retour aussi loin dans le temps ne dura pas. Car déjà, les images redevenaient floues, et d'autres prirent leur place dans les secondes qui suivirent. Owen remarqua aussitôt le Sapin de Noël dans un coin du salon, aussi dépouillé qu'il devait l'être en ce moment-même. Putain de merde...

▸Génial ! Le réveillon de mes dix ans !

Il se pinça la lèvre inférieure, purement agacé par ce qu'il avait subi ici aussi. Owen s'en souvenait tout aussi bien que de sa première gifle. Et pour cause... Deux semaines avant Noël, il avait exigé de sa mère une androïde de compagnie. Le fameux modèle Chloé RT600 tout neuf et flamboyant ! Mais cette sale droguée, une fois de plus, n'était pas concernée par ce type de nouveauté technologique de l'époque et du coup, elle n'a eut d'autre choix que de le punir comme il se devait. Le verdict ? Trois jours dans sa chambre, sans boire ni bouffer ! Et la cerise sur le gâteau ? Aucun cadeau le jour J, et une soupe avec un crouton de pain pour faire la blague.

Si jusque là il avait gardé son calme, le rouquin ne pouvait pas admettre d'avoir à revivre toute cette merde. Qu'est-ce que ça leur apportait au juste hein ? De constater ses échecs en plus de ses troubles ? S'il avait viré dingo, c'était pour ne plus avoir à y penser. Ses voix avaient fait le travail, en lui concevant une bulle autour de lui, chassant par la même occasion les pires moments de sa vie. Mais cette Embers de malheur avait trouvé le moyen de lui faire revoir ces vidéos de sa vie !

▸Si tu penses m'avoir North, tu t'gourres !

▸C'est ce qu'on va voir Owen.

Il va sans dire que la brune n'allait pas se contenter de si peu, discutant avec la corrompue de ce qu'elle percevait, mais aussi des statistiques que cela allait lui apporter dans sa phase test. Elle ne savait pas exactement le pourquoi du comment de cette machine infernale, mais elle devait bien admettre, pour l'avoir vu et essayé, qu'elle faisait des miracles sur quiconque en avait besoin. Et en cet instant, le prisonnier allait casquer !

Where is my mind ?

Si seulement Owen s'était contenté de rester chez lui le soir du onze novembre, il n'aurait pas à vivre cette putain d'expérience déplaisante. Oh il se marrait bien au départ hein ! Mais lorsque North et Embers se mirent en quête de faire tomber le masque sur son petit secret de famille, il n'était pas jouasse à l'idée de collaborer. Aucune des deux n'était prête à le savoir, pas plus le mériter. Qu'est-ce qu'elles en feraient de ce souvenir putain ? Le graver dans leur crâne de conspiratrices dégénérées ? Ou le claquer en bonne blague de l'année ? Non, l'américain n'allait pas se laisser faire.

▸Et si t'allais crever pour voir ?

Cette femelle ignare avait beau se foutre de sa tronche, il ne la calculait même pas. Le travail, sa machine et tout le baratin qui allait avec comptait bien plus aux yeux de cette folle d'Embers. Qu'est-ce qu'elle cherchait au juste ? À plaire à sa Maman ?

▸J'dirai que dalle !

▸Bien sûr que si Owen. Fais-nous ce plaisir.

Bordel ! Il n'était pas au bout de ses peines... Parce qu'il avait parfaitement compris la manœuvre. La salope en chef voulait assister à sa renaissance. Au soir jouissif où Owen avait poussé sa mère à se suicider. Mais il aimait jouer le poil de carotte, si bien qu'il eut un fou-rire, cachant au mieux ce qu'il avait de plus précieux dans le fond de son crâne moisi par les voix multiples. Mais puisque les deux traînées voulaient bien accéder à sa mémoire, il comptait bien les servir. Ainsi, c'est avec une pure indifférence qu'il leur montra des flashs de ce qu'il avait vécu par le passé. Son premier vol de voiture à l'âge de quinze ans, ses défonçages de gueule à la récré, ses prises de bec avec la matrone, et même ses passages répétés à la DPD. Oh ça ! Il se souvenait très bien de la face dépitée de @Hank Anderson à chacun de ses séjours en taule. Il y avait de quoi virer chèvre ! Il continuait de se marrer Owen, conscient qu'il allait passer un sale quart d'heure.

Where is my mind ?

Oh il jouait au plus malin le rouquin, mais les deux tortionnaires en avaient plus qu'assez de devoir supporter ses défis. Si bien que Embers n'eut d'autres choix que de monter le volume dans son cerveau. La décharge, autrefois supportable comme si on le chatouillait, faisait davantage plus mal maintenant. Il serrait les dents pour ne pas hurler sa douleur. Ce qu'elles désiraient, elles finiraient par l'obtenir par la force. Et après deux à trois minutes de lutte acharnée avec cette putain de machine sans âme... Il capitula, proche de l'agonie.

▸North, si jamais j'sors d'ici, tu vas claquer !

▸N'y comptes pas Owen... Tu sais que tu ne peux plus partir.

Et le poil de carotte ferma les yeux. Dix-sept septembre, l'année de ses dix-huit ans. Il se trouvait dans l'appartement miteux de sa mère, qui depuis était devenu le sien. Il n'en pouvait plus de la voir. Il n'en pouvait plus de supporter sa présence néfaste, de sentir l'odeur de Red Ice planer entre ces quatre murs jour après jour. Elle était dans un bad trip, comme à son habitude. Cette bonne vieille Mylène se plaignait d'être immonde, et de vouloir mourir mais surtout ? Elle marmonnait après le ciel de lui avoir donné un fils aussi idiot. Oh qu'à cela ne tienne salope. Puisqu'elle désirait ardemment en finir avec sa vie, Owen ne s'était pas privé pour lui montrer la voie de la mort. Planqué derrière le canapé où elle comatait, il s'était fait passé pour sa conscience torturée. Il lui avait si bien retourné le ciboulot là, qu'elle a voulu en finir. Surdose de médicaments, le destin d'une camée aux cristaux rouges. Oh il ne s'en cachait pas le garçon... Il en avait joui de plaisir, d'avoir pu la voir expulser son dernier soupir sans personne à ses côtés. Et depuis, il avait su se passer de ses sermons à deux balles.

▸Ça suffit... Arrêtez...

Voilà. Sa tête était sur le point d'éclater, comme s'il y avait une multitude de pivert qui tapaient contre sa boite crânienne en même temps. Il ne voulait pas le montrer, à qui que ce soit... Trop tard pour lui, @North WR400 connaissait son petit secret.

▸Embers ? Tu peux arrêter. Bon travail.

Toujours installé sur cette putain de chaise très inconfortable, il n'entendait pas les directives de la cheftaine à son encontre. Qu'elle demandait à ce que le rouquin retourne dans sa cellule en solitaire, loin de @Jake Price et du poing qui le démangeait un peu trop à son goût. Oh il lui en voulait, d'avoir poussé la chansonnette aussi loin. Est-ce qu'il comptait lui faire payer tôt ou tard ? Très certainement, mais il n'en avait pas encore les moyens. Et pour l'heure, Owen était sur le point de faire un rêve des plus démentiels. In Wonderland...