Love at the first sight

Neuf heures trente du matin. Des gens. Encore des gens. Tous ces putain de gens soumis qui grouillaient dans le centre ville de Détroit en cette fin d'hiver rude. Quelle merde ! Diki n'aimait pas vraiment côtoyer la populace d'aussi près. D'autant qu'elle devrait roupiller dans ses draps de satin. Alors ? Pourquoi cette volonté d'aller faire du shopping au lieu de se reposer ?

Une robe de soirée digne de ce nom. Voilà ce qu'elle cherchait, en vain. Elle était difficile la népalaise. Elle avait des goûts de luxe, même si elle arborait le noir comme personne. Mais cette fois-ci, il lui fallait quelque chose de plus... Clinquant. Brillant. Elle visualisait une putain de fiesta pour les dix ans de son club en octobre, et elle voulait prendre de l'avance sur l'horaire. Son club donnerait une réception à la hauteur des espérances les plus folles. En hôtesse impeccable, Diki se devait d'être belle.

Alors elle vadrouillait en ville, passant de boutique en boutique, sautant la politesse imposée pour la plupart. Histoire de zieuter certaines robes sans passer par la case essayage. Parce qu'elle n'avait pas de temps à perdre avec ces conneries. Parce qu'elle refusait de se mêler à la foule comme ferait le premier mec standard. Et ce malgré les consignes dictatoriales de Markus. Finalement, rien ne lui avait plu. Et puis elle se souvint qu'à la tour Blue Diamond il y avait une boutique de luxe. Alors elle revint sur ses pas et, pas moins d'un quart d'heure plus tard, elle atteignit le Luxury Sense à la limite de la rupture. Elle était entrée en trombe, sans s'imaginer qu'elle avait fait un peu trop de bruit en passant la porte.

▸Bonjour...

Une dame fort élancée se tenait devant elle. Une excentrique très séduisante. La vue de ses cheveux lui donna un sourire moqueur. Ce rose cuivré n'avait vraiment rien de naturel ! Mais qu'importe. Elle restait conquise Diki, par cette élégance que l'inconnue dégageait rien qu'en la regardant. Et ce pantalon en cuir... Comment avait-elle fait pour ne pas la remarquer avant ?

Elle sentait toute sa frustration se liquéfier au fil des secondes. Une certaine quiétude émergeait peu à peu des pores de sa peau, comme si elle avait deviné qu'elle trouverait ce qu'elle cherchait ici. De la pure inconscience... Entre ces quatre murs dont elle retiendrait le nom. Une longue minute passa, sans qu'aucune d'entre elles ne puisse prononcer le moindre mot. Jusqu'à ce qu'une question s'échappe enfin.

▸J'aurai besoin d'un conseil vestimentaire.

Mensonge éhonté. La blonde connaissait ses goûts. Mais son petit côté taquin avait jaillit des profondeurs de son humeur. Elle avait envie de voir la femme en rose et noir à l’œuvre. Pas pour la juger, mais pour vérifier que son intuition ne lui faisait pas défaut. Et puis son fils ne risquait pas d'en souffrir...

▸Vous auriez des robes de soirée qui sortent de l'ordinaire ?

Avait-elle seulement idée de la dame qui se tenait en face d'elle hum ? Qu'elle côtoyait la gérante de cette boutique très chic ? Qu'elle venait donc, d'un simple battement de cils, de dénicher la meilleure associée qui soit et... l'unique amour de sa vie ?

Love at the first sight

La belle dame en rose et noir ne tarda pas à la guider vers une rangée de robes plutôt chatoyantes. Elle l'avait surprise Diki, à l'observer sous tous les angles. Déformation professionnelle ? Ou une simple prise de mesures de tête ? Allons donc, les deux lui convenaient à vrai dire. Elle patientait Diki. Ni plus ni moins conquise par cette fabuleuse mise en matière tout en légèreté. Elle n'avait rien prononcé sur son choix initial de robe. Était-ce pour une soirée ordinaire ? Un rendez-vous galant ? Ou bien les fêtes de fin d'année ? Elle aurait pu faire un effort et aiguiller la spécialiste de mode. Mais elle n'en fit rien, préférant se laisser surprendre. Verdict ? Trois propositions s'offraient à elle.

Le support comportait là une robe argentée vintage, une robe bustier rouge et une autre bustier noire. Elle arqua un sourcil la népalaise. En voilà une bonne surprise ! il y avait du luxe. D'un simple coup d’œil, elle commençait déjà à se faire une idée. Et lorsque son interlocutrice lui demanda de toutes les essayer avant de donner son avis, c'est tout naturellement que Diki lui donna satisfaction.

▸Bien entendu. Vous permettez ?

Alors la népalaise s'empara de toutes les robes du rack et se faufila dans une des cabines d'essayage. Elle tira le rideau de cuir beige et se retourna vers un miroir grandeur nature. Elle allait devoir porter une sacrée paire de talons hauts ! Chaque chose en son temps... Il lui fallait procéder par ordre. D'abord, elle accrocha les robes sur la patère à disposition au mur. Puis, elle s'éclipsa de la cabine pour dégoter la première paire de talons disponible. Elle opta pour du blanc... Couleur affreuse, mais hauteur idéale. Pour un simple essayage, elle n'allait pas chipoter. Elle fit volte face et regagna vite la cabine, sous l’œil amusé de cette chère excentrique. Un clin d’œil complice jaillit sur son visage. Elle ne la connaissait pas, mais elle s'amusait déjà à la séduire. Et pas qu'un peu !

▸Essayer une robe sans talons hauts... c'est un sacrilège !

Elle faisait la fière. Mais elle savait que la critique exacerbée allait faire surface dans les prochaines minutes. Haussant les épaules mentalement, Diki se mit en sous-vêtements et elle observa son bas ventre qui avait à peine grossi. Elle commença par la robe grise. La dentelle lui posait bien des problèmes. Elle n'était pas vilaine loin de là, mais pas faite pour son charisme démesuré, et pas pour les dix ans de son établissement !

Adieu la grise ! Elle l'ôta en vitesse et prit la robe bustier noire. La fente sur l'avant lui plaisait énormément... mais sa maigre poitrine ne lui rendait pas sa valeur. Elle soupira, observant son décolleté trop plat. Comment Wolf avait-il pu se contenter de si peu ? À croire que sa prestance faisait tout le reste.

Dégage la noire. Il n'en restait plus qu'une. Diki la prit entre ses doigts et la déroula de tout son long. D'un sublime rouge sang, brillante à souhait, elle tiqua dessus. SI la taille était bonne... Elle l'enfila, prenant soin d'arranger son push-up sans bretelles au préalable. Et lorsqu'elle ouvrit les yeux sur son propre reflet, son cœur rata un battement.

▸Putain de merde...

Elle-même n'en croyait pas ses yeux. Elle qui ne mettait que du noir se retrouvait bluffée par sa propre apparence. Cette robe lui allait comme un gant de soie. Taillée sur mesure, comme si elle avait servi de mannequin au départ. Elle ne pouvait pas la laisser dans cette boutique ! Impossible. Qu'importe le prix ! Elle la voulait. Cachant ses talons blancs à vomir, elle quitta la cabine d'essayage et se dirigea vers la bienheureuse qui avait eu l'idée de génie de la lui confier. Les employés présents sur place cessèrent de travailler. Elle était au centre de l'attention Diki, et c'était l'effet recherché.

▸J'ai fait mon choix... Qu'en pensez-vous ?

Elle dévora la dame en rose et noir. Littéralement, comme pour lui démontrer qu'elle avait marqué un point non-négligeable sur leur future relation. Cette femme avait un sacré talent putain... Et son intuition était excellente une fois encore. Maintenant ses mains sur ses hanches, elle sourit en coin, attendant leur avis. La népalaise avait-elle bien calculé le nombre de mois à venir ? Car l'accouchement était d'ors et déjà prévu pour Octobre. Mais avec la vie risquée qu'elle devait assumer, l'heure de côtoyer son fils serait aisément avortée...

Love at the first sight

Le verdict tomba. Tous se liquéfiaient devant Diki comme s'ils n'avaient jamais rien vu de tel de leur vie. Quant à la femme en rose et noir, elle se contenta de lui dire quelque chose dans une autre langue. Était-ce là du français ? Elle arqua un sourcil interrogateur tandis que la belle demoiselle s'approchait de la blonde. Elle glissa ses doigts dans sa chevelure et la fit pivoter pour se retrouver devant un autre miroir grandeur nature. Elle pouvait sentir son parfum, un véritable envoûtement.

▸Je pense que le chignon ferait trop austère...

La népalaise avait eu le choix entre deux coiffures. Bien que la deuxième tendait vers une femme très professionnelle, elle optait pour la première, avec les cheveux coiffés sur le côté et légèrement ondulés. Mais lorsque Diki vit sa tignasse revenir derrière son dos, elle se retint de justesse de se retourner et de planter ses yeux bridés sur ses pommettes saillantes. Elle ne bougea pas et jeta un coup d'œil rapide vers elle à la place, qui se dépêchait d'aller chercher une autre paire de talons assortis à la robe qu'elle portait en ce moment-même. Comment avait-elle cerné la pointure de ses pieds ? Elle n'en dit rien et écouta calmement ce qu'elle lui proposait en plus de ces chaussures. Point de vue bijoux et autres fantaisies clinquantes, Diki avait tout ce dont elle avait besoin. Alors, lorsque la femme en rose et noir lui demanda si elle nécessitait d'une aide de plus, c'est tout naturellement qu'elle déclina poliment.

▸Oh vous êtes bien urbaine, mais je vais aller me changer et essayer ces petites merveilles. Merci !

Elle lui sourit et retourna en cabine sans se presser. La blonde ne voulait pas abimer cette robe. Les dix ans du Black Lotus allaient être parfaits ! Elle se rhabilla et revint vers la dame avec sa précieuse qu'elle lui tendit pour plus tard. De son autre main elle tenait la paire de talons qu'elle n'essaya même pas, car la pointure ne correspondait pas à sa taille. Un chouilla trop petites, Diki se rua vers le chiffre adéquate et posa son boule sur un banc pour enfin les tester. La hauteur vertigineuse ne la dérangeait en rien, elle avait l'habitude de porter ce genre de chaussures. Elle fit quelques pas dans une allée et retourna s'assoir pour les retirer. Il ne fallait pas qu'elle oublie sa veste ainsi que son sac à main, toujours accrochés dans la cabine qu'elle venait de quitter. Et puis finalement, elle fit signe à la somptueuse beauté de la rejoindre pour une petite discussion entre femmes.

▸Je vais prendre ces escarpins. Votre talent est indéniable... Jamais je n'irai le remettre en doute. Vous n'avez pas idée à quel point je suis ravie !

Et elle le pensait vraiment la népalaise. De façon assez subtile, elle caressa son bas ventre l'espace d'une seconde avant de se raviser devant cette beauté. Il n'était pas question d'annoncer sa grossesse... Parce qu'elle lui plaisait. À mort, et qu'elle ne voulait pas perdre ses chances, même si la femme en rose et noir paraissait plus jeune qu'elle.

▸Je paierai cher pour vous allouer vos services ma chère...

Elle venait de retrouver son petit air espiègle. Elle avait l'œil qui pétillait de malice, comme pour lui signaler qu'elle était prête à tout pour l'avoir dans son équipe au Black Lotus. D'autant que son intuition lui hurlait qu'elle avait un potentiel bien plus grand que ce qu'elle pensait...

Love at the first sight

Diki savait qu'elle avait aiguisé sa curiosité. Elles s'observaient les deux femmes en ruth. La dame en rose et noir tentait-elle de décrypter sa dernière phrase ? Il n'y avait rien de compliqué. Elle avait besoin de ses services. Elle la voulait au Black Lotus. Pour ses soirées à thème entre autres. Elle avait du potentiel. Ce genre de coup de foudre-là... C'était plus que de la chance. Un véritable petit bijou qu'on avait déposé sur un écrin d'argent à son intention.

Elle attendait que son interlocutrice la surprenne... Ce n'était pas la peine de la remercier voyons, comme de lui avouer ses qualifications. Elle s'en foutait. Ce qu'elle voulait, c'était un bon vieux rentre-dedans. En bonne et due forme voilà. Quel genre d’équipe avez-vous ? Pas mal. Mais elle pouvait mieux faire. La népalaise revint s'asseoir tandis qu'une autre question fusa à la première. Où travaillez-vous pour avoir de besoin de mon service ? Son sourire amusé prit une toute autre dimension.

▸Disons que je gère un club de luxe plutôt non loin d'ici...

Pourquoi ne pas lui donner la réponse tout de suite ? Mais pour la faire réfléchir. Pour voir si la femme voyait où elle voulait en venir. Certains de ses habitués étaient bien trop élégants chez elle. C'était impensable qu'ils n'aient jamais mis les pieds ici. Elle devait connaître le Black Lotus. Diki en mettrait ses deux mains à couper.

Laissant planer une longue minute de suspens, elle retira enfin les escarpins et les tendit à celle qui se présenta enfin. Olivia. Très joli nom. Était-il à consonance française ? Peut-être bien. Elle voulait lui donner le sien la demoiselle, mais un soucis d'étique lui imposa le silence. Pouvait-elle lui faire confiance ? Une denrée rare de nos jours. Elle l'avait dit et répété. Seule Miss Red devait être évoquée quand on parlait de la patronne du Black Lotus. Elle jouait sa vie avec la Coalition là ! Elle ne pouvait pas se permettre qu'on remonte jusqu'à elle. Eagle en savait trop...

▸Appelez-moi Miss Red... pour le moment.

Peut-être que son pseudonyme allait lui évoquer quelque chose de connu ? Elle y tenait intensément Diki. Question d'anonymat permanent. Seule son équipe connaissait son véritable nom. En privé, loin des regards indiscrets et surtout des habitués ! N'importe qui pouvait faire partie de son groupuscule. Entendre le son de sa voix vulgaire. Faire le rapprochement. Le divulguer à n'importe qui... Cette saloperie d'effet boule de neige qu'elle redoutait depuis plus d'un an maintenant.

▸Je serai ravie de reprendre cette discussion avec vous. Et lorsque vous aurez un moment à m'accorder, bien entendu...

Était-elle pressée de retrouver son studio et son lit ? Oui et non. La compagnie d'Olivia était particulièrement plaisante, mais elle avait du travail... Tenir une boutique en l'occurrence. Elle n'avait pas encore capté qu'il s'agissait de la boss. Bien qu'à la réflexion, sa petite voix intérieure lui avait déjà soufflé cette éventualité.

Love at the first sight

Diki fut extrêmement ravie d'apprendre qu'Olivia avait du temps à lui consacrer tout de suite. Sa petite voix avait raison à son sujet. C'est elle qui chapeautait tout ici. Elle se pinça la lèvre et posa ses mains le long de ses hanches. Son pseudonyme ne lui était pas inconnu. Le contraire aurait été fâcheux. Et irréaliste. Elle baissa subitement le son de sa voix. Le Black Lotus, un endroit sublime où elle reconnaissait de jolies choses quand elle les voyait hein ? Façon très utopique de décrire l'endroit que Diki avait créé de toute pièce. Donc elle était déjà venue. Son opinion était faite. Il n'était plus question de la convaincre désormais, mais de lui donner l'accès à son étage.

▸Vous me flattez Olivia.

Un employé se pointa à la demande de la dame en rose et noir. Il s'empara des escarpins et partit les mettre en boite. Olivia insista une fois encore. Elle pouvait se libérer dans la minute. Pourquoi la faire attendre ? Diki acquiesça poliment.

▸Laissez-moi payer ces merveilles et je suis à vous.

La blonde se rendit vers le comptoir qui faisait office de caisse. Sa robe était prête, pliée avec soin dans une enveloppe en cuir. Elle devra la repasser une fois revenue chez elle. Ses escarpins trônaient eux aussi dans une belle boite munie d'un ruban. La népalaise dégaina sa carte de crédit, soulagée de s'offrir cette tenue à la hauteur de sa réputation. Et quand le prix s'afficha enfin... 1500$ de shopping ? Elle s'en foutait complètement.

▸Je pourrais avoir un grand sac s'il vous plaît ?

Tant de politesse pour si peu... Elle se donnait envie de vomir. Mais par respect envers Olivia, elle faisait ce gros effort. Elle côtoyait ses employés avec un minimum de distinction. Comme ses habitués auprès de ses filles. Bref. Le jeune homme devant elle s'affairait à la tâche, sous le regard avisé de sa boss. Il s'appliquait à ce qu'elle soit servie comme il faut. Tant de ronds de jambe pour rien... Diki reviendrait ici. C'était certain. La transaction terminée avec succès, elle se tourna vers sa future associée. Sourire aux lèvres, petit air malicieux revenu à la charge dans les yeux, elle s'avança vers elle et vint se poster à quelques centimètres de son joli minois.

▸Ça vous dirait un café... Sundaratā ?

Elle avait parfaitement articulé le dernier mot prononcé dans sa langue natale. Sa beauté à elle seule. Elle lui lança un clin d’œil complice. Le deuxième du jour. Ou était-ce le troisième ? Peu importait... Elle l'avait dans la poche. Et le meilleur restait à venir, car la népalaise allait sortir le grand jeu.

Love at the first sight

Les deux femmes se comprenaient à merveille. Elles quittèrent les lieux ensemble, saluant les employés au passage. Olivia entraîna donc Diki non loin de la boutique, dans un petit café aux allures atypiques du rez-de-chaussée de leur propre tour. Et la népalaise entra la première. Elles partirent s'installer sur une table pour deux, fort éloignée du centre. Diki déposa son sac le long du mur, prenant soin de cacher ce qu'il contenait. Un vol est si vite arrivé de nos jours... Elle eut à peine le temps d'ôter son manteau qu'un serveur plutôt mignon s'approcha d'elles pour prendre commande. Il ne perdait pas de temps !

▸Un Cappuccino. Merci...

Diki ne fit pas tant attention à ce qu'Olivia prenait. Elle semblait quelque peu perplexe dans ce type d'endroit. Car elle n'avait pas l'habitude de la foule. Son club restait l'exception à la règle parce qu'elle contrôlait ce qu'il s'y passait. Mais dans un café qu'elle ne connaissait pas... Ah ! Sa réflexion maladive s'envola dès l'instant où son homologue féminin lui fit un compliment sur sa robe. Une éloge de plus ? Cela devenait gênant.

▸Je... J'avoue ne pas avoir fait le rapprochement.

De quoi donc ? Que Miss Red puisse porter une robe rouge ? Effectivement. Ça semblait si évident qu'elle ne s'en était pas préoccupé du tout. La népalaise avait autre chose à penser. Comme découvrir le joyau de sa collection vestimentaire pour les fêtes de fin d'année. Elle rendit néanmoins le clin d’œil à Olivia. C'était sincère, pas un faux pas de sa part. Le serveur revint avec deux tasses. Son Cappuccino était surmonté d'une fleur de Lotus en fine mousse. Un léger sourire apparu sur ses lèvres roses. Était-ce un signe ? Ou une pure coïncidence ? Elle haussa les épaules. Ça n'avait aucune réelle d'importance pour l'instant. Diki s'empara de sa tasse et but une gorgée. Bien chaud et assez dosé. Elle reprit la discussion avec Olivia.

▸Ah oui ? Je demande à voir.

Des idées de costume hein ? C'était comme si la dame en rose et noir avait lu dans ses pensées. Elle qui n'avait justement pas de Dress Code officiel dans son club de luxe... Peut-être était-ce l'occasion pour elle de faire des affaires ? Diki s'installa plus confortablement sur cette chaise de café et tendit l'oreille aux questions suivantes.

▸Auriez-vous un sixième sens par hasard ?

Diki n'avait rien prémédité. Si au réveil, quelqu'un était venu lui dire qu'une très jolie femme serait intéressée de travailler avec elle... Son katana aurait agi en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Et elle ne se serait même pas levée de son lit !

▸Mon club ne dispose pas de Dress Code concret pour l'heure. Mes filles décident par elle-même selon les soirées. J'avoue ne pas être satisfaite de ce fonctionnement. Si je pouvais leur enlever cette charge et avoir un standing impeccable...

Elle soupira silencieusement, avant de reprendre une lampée de son Cappuccino bien chaud. Pourquoi n'avait-elle pas pris ces dispositions avant toute chose ? Parce qu'elle était dans l'urgence. Maintenant ? Elle le regrettait. Qu'on se le dise. Ses filles seraient bien plus professionnelles... si une spécialiste de la mode prenait les choses en main.

Love at the first sight

Elles s'observaient en silence les deux femmes, comme si elles se connaissaient depuis toujours. Comme si... Olivia avait percé le mystère qu'était Diki au quotidien. Et malgré qu'elle regrettait de ne pas avoir son portfolio ici à deux reprises, elle semblait emballée. Non... tellement plus que ravie de se lancer dans un projet pareil avec la népalaise. Un soulagement s'en dégageait tout à coup.

▸Oubliez le portfolio. Je le verrai de mes yeux. Et...

Oui. Diki était prête à la voir à l’œuvre dès ce soir. Quitte à la payer une petite fortune pour la garder à ses côtés. Mais autre chose la taraudait. Rien de grave non. Une simple question de protocole. Elle vida son Cappuccino d'une traite, lâcha la tasse sur la table, se contrefoutant du bruit, et déposa sa main sur celle de la française.

▸J'ai horreur de vouvoyer les autres. C'est d'un vieillot...

Une horreur pour elle. De devoir faire des ronds de jambe aux gens. Alors qu'il suffisait de les tutoyer pour obtenir ce que l'on voulait. Un frisson parcourut son corps un peu frêle. Ses yeux de biche se délectaient de ce qu'ils avaient en face d'elle. De cette superbe dame en rose et noir qui lui faisait un effet pas croyable. Tout ça pour une robe de soirée au départ ! Le destin était joueur parfois.

▸J'espère que ça ne te dérange pas Olivia ?

Un jeu... ce n'était qu'un jeu de séduction où chacune avait ses propres cartes. Maniées avec le plus grand des soins, ou tout simplement balancées sans même les regarder, le duo ainsi formé était prêt à mettre le paquet au club. À le rendre plus beau de l'intérieur. Diki jubilait en silence. Ses filles seraient enfin professionnelles. Une pub de folie se profilait dans son esprit totalement addict. Il était temps d'aller travailler. Là ! Tout de suite. Tant pis pour la grasse matinée.

▸Quand serais-tu libre pour venir au Black Lotus ?

Elle ne perdait pas le Nord. Ça non ! Sa volonté de la voir créer la démangeait de plus en plus. Elle n'avait pas lâché sa main Diki. Bien au contraire ! Elle s'amusait à entrelacer ses doigts de façon subtile. Un clin d’œil poppa sur son visage radieux. Une enfant devant le Père Noël. Allait-elle obtenir satisfaction dans les prochaines secondes ?

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Olivia venait d'ouvrir en grand la porte. Un oui émergea de ses lèvres tandis que Diki lui déploya son plus beau sourire. Oui... Un empressement partagé se diffusait dans l'air. L'une voulait créer, l'autre désirait la voir faire. Même s'il était encore tôt, la népalaise allait convoquer ses filles pour l'occasion. Alors, elle ne traina pas une minute de plus. Libérant la main de sa future associée, elle fit signe au serveur de lui amener l'addition pour deux. Aux grands mots les grands remèdes !

▸C'est moi qui offre.

Elle ne lui avait pas laisser le temps de protester. Sa carte de crédit fusa plus vite que l'air, et un simple tip's fut laissé sur la table. Par principe. Parce que Diki frisait le paroxysme de la gaieté. Depuis quand n'avait-elle pas eu ce pep's matinal ? Une éternité. Lançant un regard complice à son acolyte fraîchement trouvée, elle se leva de sa chaise et récupéra son large sac de shopping. Cette superbe robe risquait d'être remise dans la journée. Si cela pouvait aider la dame en rose et noir à trouver l'inspiration pour ses filles... Elle ne s'en priverait pas.

Les deux femmes quittèrent le café dans la hâte. Diki manqua même de bousculer une vieille dame sur sa route. Et merde ! Était-elle trop pressée et excitée au point de ne plus faire du tout attention à la populace humaine avoisinante ? Plus que certain. D'un pas ferme mais décidé, elle entraîna son Olivia dans l'ascenseur de la tour Blue Diamond où figurait le Black Lotus. Joyau inestimable de son labeur incessant. Elle sortit une clé de sa poche et l’inséra dans la serrure de la porte principale. Il n'était pas ouvert au public avant une certaine heure. Ou seulement pour ses employés.

▸Par ici. Voyons de quoi tu es capable, chère Olivia.

Et c'est ainsi qu'elle entraina sa précieuse invitée tout en haut de l'immeuble, lui faisant visiter ce night club que beaucoup convoitaient pour son luxe et ses filles. Une joie indescriptible se lisait sur le visage un peu fatigué de Diki. Mais ça ne faisait rien. Parce qu'à partir d'aujourd'hui, elle allait donner un tout autre charme à son business. Et ça n'avait pas de prix. Plus encore, elle venait de trouver son âme-sœur, loin du charme de son frère et des frasques décevantes de Jake. Une femme de caractère, fidèle à ses principes, sur qui elle pourrait compter jusqu'à la fin de ses jours. Et peut-être même pour son fils à naître. Elle lui dirait en temps utile. Patience Diki, patience...